Fanny Courau, facilitatrice et coach en psychologie positive
Publié le 28 juillet 2023, par Katia Crabé
Temps de lecture : 25 min
Présentation de Fanny Courau
Interview de Fanny Courauµ
Le Nouveau Monde selon Fanny Courau
Le portrait chinois de Fanny Courau
Présentation de Fanny Courau
Katia : Aujourd’hui (12 juin 2023), je reçois Fanny Courau.
Elle est facilitatrice et coach en psychologie positive. Elle est également secouriste, premiers secours en santé mentale jeune. Mais elle n’a pas toujours été. C’est au terme d’une trajectoire professionnelle atypique et d’une rencontre avec elle-même qu’elle peut aujourd’hui accompagner les jeunes auprès desquels elle œuvre en changeant de casquette au gré de leurs besoins. Je vous invite à vous immiscer dans notre conversation pour faire la transformation. Bonne écoute.
Interview de Fanny Courau
Katia : Bonjour Fanny
Fanny : Bonjour Katia
Katia : Je te remercie de participer à Aujourd’hui, écrivons demain. Pour commencer, est-ce que tu voudrais bien te présenter en quelques mots ?
Fanny : Je suis Fanny Courau, femme de quarante-neuf ans, maman de trois enfants. Je suis effectivement depuis neuf mois, facilitatrice et coach en psychologie positive. J’ai été formée auprès Positran et plus précisément auprès d’Ilona Boniwell qui a été disciple de Martin Seligman. Donc pourquoi le choix de la psychologie positive ?
Katia : Est-ce que tu veux bien effectivement nous expliquer c’est que la psychologie positive ? Et pourquoi ?
Fanny : Avec grand plaisir. Alors la psychologie positive, c’est un courant de la psychologie, je dirais classique qui est né dans les années quatre-vingt-dix grâce à Martin Seligman qui s’est dit que c’était bien aussi de scruter tout ce qui fonctionne bien chez l’humain ? Autant la psychologie, je dirai normale, elle permet de mettre des mots sur pourquoi ce qui dysfonctionne, ce qui bloque. A l’inverse, la psychologie positive va travailler sur ce qui fonctionne, ce qui permet d’être humain, d’être dans un fonctionnement optimal, d’être vraiment auteur et acteur de sa vie. Et donc c’est vraiment une étude scientifique basé sur des recherches auprès de personnes et une relecture de toutes ces recherches par des professionnels. Martin s’appuie sur cinq piliers.
Katia : Peux-tu peux nous parler de ces cinq piliers ?
Fanny : Oui, les cinq piliers qui sont le fondement de la psychologie positive sont :
- les émotions positives qu’on peut appeler aussi l’intelligence émotionnelle,
- l’engagement, se sentir engagé que ce soit dans sa vie personnelle, professionnelle ou associative,
- les relations avec toutes les personnes qui nous entourent, des relations positives et constructives,
- le sens de la vie, quel est mon but, ma mission, quel sens je veux donner, quelle couleur je veux donner à ma vie,
- l’accomplissement, la réussite.
Dans la psychologie positive, on aborde la notion de résilience, de bien-être, d’optimisme, de créativité, de gratitude, d’épanouissement personnel. C’est en lien aussi avec les thérapies cognitives et comportementales, la communication non violente et le processus de croissance post-traumatique. Alors pourquoi j’ai choisi la psychologie positive ? Je crois tout simplement que ça m’a appelé parce que ça rejoint ma personnalité. Cette joie de vivre que j’aie, ça ne veut pas dire que ma vie a tout le temps était un fleuve tranquille. Mais j’ai cette capacité à voir toujours le verre à moitié plein plutôt que le verre à moitié vide. Aussi, parce que je n’avais pas envie d’être dans une approche thérapeutique, mais plutôt dans une approche de mise en action, de mise en dynamique des personnes.
Katia : Comment est-ce que tu la mets en application dans ton quotidien en tant que coach et facilitatrice ?
Fanny : Alors il y a deux approches. Je suis facilitatrice quand j’accompagne un groupe, un collectif. Et là, effectivement, je vais utiliser tous les outils, les connaissances, mon expertise auprès des participants de ce groupe. Et donc c’est vraiment les amener à comprendre tout ce processus de bien-être, de l’épanouissement, de leur montrer effectivement qu’ils ont ces forces là en eux, cette capacité de rebond. C’est vraiment à travers des thématiques bien précises que je vais exploiter toutes ces notions que j’ai préalablement évoquées. Et dans le coaching individuel, on va partir d’une situation et aller décortiquer tout ce que la personne a déjà mis en place, qu’elle a œuvré dans cette situation-là et lui montrer effectivement les capacités et les compétences qu’elle a pu utiliser et vraiment les mettre en avant et renforcer ses compétences.
Katia : Est-ce que tu as un exemple à nous donner sur comment est-ce que tu mets en application tes casquettes de facilitatrice et de coach ? Et peux-tu nous dire auprès de quel public est-ce que tu interviens ?
Fanny : En ce moment, j’interviens dans un établissement scolaire auprès d’adolescents, des élèves de quatrième et troisième. J’ai également accompagné des enseignants. Je les fais travailler sur leurs compétences psychosociales, c’est à dire comprendre leurs compétences cognitives, émotionnelles et sociales. Durant toute l’année scolaire, j’accompagne sur des thématiques comme le bonheur, la confiance en soi, l’émotion. Comment je ressens ? Que dit mon émotion ? Quel est le besoin qui s’exprime derrière ? Je les aide à découvrir l’autre, comment il comprend par rapport à une situation donnée. Qu’est ce qui fait qu’une personne va réagir de façon différente par rapport à moi ? Je m’appuie sur des outils d’expression de ses émotions, d’expression aussi corporelle à travers la méditation, le yoga du rire. Je m’autorise une certaine liberté. Je suis beaucoup dans l’observation de ce qui se passe, ce qui se dit derrière les mots de ce qui se révèle à travers le corps. Je viens toujours avec ma mallette d’objets et d’outils. Je me laisse inspirer et j’adapte mon accompagnement en fonction.
Katia : Comment est-ce qu’ils te reçoivent et t’accueillent tous ces jeunes que tu accompagnes avec ta mallette (yoga du rire, etc.) ?
Fanny : C’est particulier parce que c’est un âge où le regard de l’autre est très important et que là on est dans le collectif. Donc au début, il y a un petit peu de pudeur, de suspicions. Je reconnais que j’ai une capacité à embarquer les jeunes assez facilement. Je pense que je réveille l’adolescente qui est en moi et qui va les rencontrer, ces jeunes ados, en tout cas ces jeunes adultes en pleine construction. Très vite, je les amène à décomplexer et je joue avec eux. Et je crois que si c’est ça le rôle de facilitatrice, c’est que je ne suis ni au-dessus, ni en-dessous. Je suis avec eux et à côté d’eux.
Katia : Tu n’es pas le sachant et ce n’est pas du descendant puisque tu participes ?
Fanny : Exactement. Et c’est un choix délibéré d’être dans cette posture-là, parce qu’ils sont dans ce système scolaire où il y a le professeur, l’enseignant qui est le sachant et eux sont les petits padawans qui doivent recevoir. Ce qui est important, c’est la notion de coéducation et nous sommes autant éducateurs, le jeune que moi. Voilà, je donne, je reçois. D’ailleurs à un moment donné, on ne sait plus qui donne, qui reçoit à quel moment. Je fais le choix d’être simplement à côté d’eux. Alors il me faut avoir un temps d’avance par rapport à ce que je perçois et ce que je ressens pour pouvoir adapter le plus rapidement possible les interventions. Par exemple le yoga du rire, c’était assez rigolo parce que, au début, ils se regardaient, ils se demandaient, ça consiste en quoi ? On va devoir rire ? Ce n’est pas naturel. Donc je leur explique aussi le processus cognitif qu’au début ce n’est pas naturel mais à un moment donné le rire entraine le rire, entraine le vrai rire, du coup entraine des émotions qui sont positives. Ils se sont petit à petit emparés de cet outil. Il faut le temps de l’apprivoisement du regard de l’autre et surtout de son propre regard.
Katia : Pour avoir participé à un atelier du yoga rire, il n’est pas évident de lâcher prise, de laisser tomber le regard qu’on peut porter sur soi, sur les autres, d’avoir peur de ce que les autres peuvent penser parce qu’il faut jouer le jeu. Il y a tout un ensemble d’exercices qui permettent d’arriver à la fin à une espèce de fou rire généralisé.
Fanny : Il n’arrive pas au début de mes ateliers en début d’année. Il y a une progression dans le choix des thématiques. Au début, par exemple, la première rencontre est sur le thème du bonheur où chacun exprime ce que signifie le bonheur pour lui, pour soi. Et puis, il faut qu’ils apprennent à me connaître, quel adulte je suis. Un rapport de confiance et de quelque part de séduction doit s’établir. Ensuite, je vais déployer les autres thèmes et m’adapter. Cette année, j’ai passé beaucoup plus de temps que prévu sur les émotions parce que j’ai senti qu’il y avait un vrai besoin de comprendre ce qui se joue et aussi d’accepter qu’ils puissent être traversés par ses émotions. Plutôt que d’émotions négatives, la psychologie positive parle des émotions agréables et désagréables. Toute émotion est bonne à vivre, aussi inconfortable soit-elle. Donc là, on a passé beaucoup plus de temps pour qu’effectivement, ils apprivoisent, ils comprennent ce qui se passe en eux et surtout qu’ils arrivent à avoir cette capacité ne serait-ce déjà de les entendre, de les identifier et de les exprimer.
Katia : Ce n’est pas facile ce que tu leur proposes parce qu’ils ont quel âge en moyenne les jeunes que tu accompagnes ?
Fanny : Dans le premier établissement, les jeunes de quatrième et troisième avaient entre quatorze et quinze ans, même treize, quinze ans selon certains et dans un autre établissement, il y avait des élèves de première. Donc là, ce sont des élèves de quinze, seize ans.
Katia : L’adolescence est une période où on n’est pas forcément très connecté à nos émotions, ou très débordé par nos émotions et dans des passages à l’acte. On se pose la question de comment ton intervention est reçue, comment ils comprennent pourquoi tu viens faire ces ateliers pour eux. Qui es-tu pour eux ?
Fanny : C’est une bonne question. Parce que là, j’arrive un adulte parmi tant d’autres et en plus extérieur à l’établissement ?
Katia : Sans que ce soit leur demande non plus. C’est la demande des enseignants et de la direction du lycée.
Fanny : C’est proposé par le lycée mais c’est basé sur le volontariat. Ce sont les élèves qui choisissent dès le début de l’année. En fait, il y a des ateliers de proposés et donc ils ont le choix entre un panel. Pour certains, c’était la première fois que cet établissement proposait ces ateliers qu’on appelle des ateliers bien être et qui était limitée à un maximum de douze jeunes. Pour moi, c’est important que le groupe ait une capacité limitée dans le nombre pour que la parole puisse être libre et qu’ils se sentent à l’aise. Très vite, j’ai eu neuf inscrits qui sont restés, que des filles. Donc ça m’a fait sourire. Je me dis « tiens, déjà cette sensibilité sur la connaissance de soi, la compréhension de soi. Est-ce que les filles sont plus sujettes ? Ou est-ce que c’est plus facile pour elles de l’aborder ? »
Katia : On a l’idée reçue que les femmes sont beaucoup plus connectées à leurs émotions que les hommes ?
Fanny : Est-ce que ça se perçoit déjà ? Ce serait très prétentieux pour moi de dire que oui. En tout cas, le constat est que je n’avais que des filles. Au lycée, pareil, ce n’était que des filles. Et alors, pour revenir à ta question, qui je suis pour eux ? Très vite, je leur explique mon parcours parce que j’ai été pendant huit ans responsable pastorale et communication dans un lycée.
Katia : Qu’est-ce qu’une responsable pastorale et communication dans un lycée ?
Fanny : Ce métier a suscité beaucoup de questions et de curiosité. Je n’en ai jamais autant parlé. J’intervenais dans un établissement privé, catholique. Pour moi, la responsable pastorale accompagne chaque personne, que ce soit les élèves comme les adultes, vers une croissance humaine et spirituelle, par le biais d’activités solidaires (aller à la rencontre de l’autre pour se découvrir soi). C’est une posture d’écoute et d’accompagnement
Katia : Comment est-ce que tu es devenue responsable pastorale communication à facilitatrice ? Comment as-tu fait le pas ? Pourquoi ? Est-ce que c’est la continuité ?
Fanny : Alors la continuité sûrement. J’en suis convaincue. Comment je suis devenue responsable pastorale à facilitatrice ? Vous avez deux heures devant vous ? Non, je vais être brève. Honnêtement, je pense que s’il y a vingt ans, on m’avait dit qu’un jour je deviendrais responsable pastorale, je serais partie dans un fou rire qui aurait duré un mois. Moi, j’ai un parcours un peu atypique. J’ai un bagage littéraire et linguistique. Je suis partie dans une formation d’éducateur spécialisé. Mais la vie a décidé que je ne devrais peut-être pas intégrer cette école là parce que j’étais sur liste d’attente. Donc je suis partie dans l’immobilier. Pendant dix ans, j’ai été assistante commerciale dans l’immobilier où je me suis régalée. Mais le rapport à l’argent me posait question et me dérangeait. Par contre, le rapport à l’humain était très présent. Ça me titillait de comprendre le fonctionnement de l’humain. Et donc j’ai fait des formations sur la compréhension de soi, de l’autre. C’était la méthode E.S.P.E.R.E® de Jacques Salomé, qui est tout autour de la symbolisation et visualisation. Et puis j’ai poursuivi mon chemin dans l’immobilier. Et chaque fois, on me disait tiens, il y a une situation compliquée, Fanny, je pense que c’est pour toi, c’est toi qui vas t’en occuper. Et de fil en aiguille, je suis partie chez un constructeur de maisons individuelles. On est encore bien loin de la pastorale. Et puis est arrivée notre petit troisième, Emilie, et le décès de ma belle-mère. On a décidé de revenir au Pays basque. Là, je me suis dit que j’allais prendre le temps de me poser, je ne m’étais jamais arrêtée pour m’occuper de mes deux aînés, et de faire des formations. Je suis une grande curieuse, j’ai toujours un besoin d’apprendre, de comprendre et toujours en lien avec effectivement les liens, le relationnel, l’humain. J’intègre ce qu’on appelle le parcours Alpha. C’est un parcours pour les personnes qui se posent des questions sur le sens de la vie qui a des origines dans l’église anglicane. J’étais très loin de tout ça mais à travers ces douze rencontres, je découvre Jésus. Les messages que ce personnage historique pouvait véhiculer ont résonné à l’intérieur de moi. J’ai commencé à creuser, à rencontrer des prêtres, des personnes croyantes, pour comprendre un petit peu ma belle-mère qui était une personne qui avait une foi qui me posait question. Elle s’est retrouvée seule à s’occuper de ses enfants et elle a eu cette capacité à rebondir. Je me disais c’est quand même extraordinaire d’avoir cette foi qui donne cette force. J’avançais sans me soucier de ce qui allait bientôt m’arriver. Quelqu’un que je connaissais m’observait de loin faire mon petit chemin et mon avancée vers un chemin de foi. Je ne sais pas si j’allais vers ça mais la personne qui m’observait était la responsable pastorale dans cet établissement. Un jour, elle me contacte et me dit qu’elle pense à prendre sa retraite et qu’elle cherche une personne pour la remplacer. Je lui souhaite bonne chance.
Katia : Tu n’as pas compris le message subliminal ?
Fanny : Je n’ai pas compris le message. Je crois qu’il y a des fois où on n’a pas envie de l’entendre. Et donc je lui dis c’est très bien, bonne chance. Elle me répond « je pense avoir trouvé quelqu’un et cette personne, ça serait toi ». Heureusement, on n’était pas en visio parce que je pense qu’elle aurait vu ma mâchoire se décrocher ! Je lui rétorque qu’elle se trompait complètement de personne, et que moi-même, j’étais en plein questionnement spirituel. En plus, je n’avais jamais travaillé auprès de jeunes, dans l’Éducation Nationale. Elle m’a dit « tu as un an pour réfléchir, parce que c’est dans un an que je partirai à la retraite et que je cesserai mon activité ». Un an passe, moi je continue à mener mon enquête.
Katia : Et que fais-tu de cette proposition pendant un an ?
Fanny : Alors honnêtement, je l’ai bien mise de côté. Je me suis dit qu’elle était très polie, qu’elle m’appréciait énormément pour me proposer ça, qu’il avait dû se passer une déconnexion chez elle.
Katia : Sur un malentendu peut-être ça pouvait marcher.
Fanny : Honnêtement, je n’y ai pas du tout cru. En même temps, j’entendais une petite voix qui me disait, il n’y a pas de hasard, réfléchis à cette petite voix, continue, ne ferme pas la porte, laisse-toi l’opportunité. Donc j’ai continué à avancer. Et puis l’année se passe, j’étais toujours en congé parental. Elle me contacte et me dit « écoute, j’ai parlé de toi au directeur de cet établissement et il est prêt à te rencontrer ». Je me suis dit pourquoi pas, Ça ne coûte rien. J’ai passé l’entretien qui s’est très bien passé. J’ai bien dit que j’étais néophyte dans le milieu de l’éducation et même dans ma foi. J’étais en plein cheminement, mais ce directeur a cru en moi. Il m’a dit qu’il avait confiance et envie d’une personne avec un regard nouveau, un regard neuf. Trois jours se sont passés, trois jours de joie où je me suis dit « génial, je vais être enfin dans l’humain, dans le cœur de l’humain, en plus auprès des jeunes ». C’est quelque chose qui me travaillait depuis quelques années. Et puis en fait, les trois jours se sont passés et là, j’ai eu un moment de panique totale, d’angoisse en me disant « ce n’est pas ma place, je ne suis pas formée ». J’ai été accompagnée et j’ai senti très fort en moi une présence. Un soir, une vraie présence, une vraie force qui m’a dit « Fanny, vas-y, c’est pour toi. Et puis tu ne seras pas seule ». Donc je dis oui avec le trouillomètre à cent. Avec cette certitude que je n’étais pas seule, que j’étais vraiment accompagnée, que si c’était mon chemin, il fallait que j’y aille. Et puis si je me plante, le risque n’est pas énorme. J’ai passé huit ans dans cet établissement où je me suis régalée vraiment, où j’ai été nourrie de ses rencontres et où j’ai pu découvrir quelle était ma foi, mes limites. Celles de ma foi et celles de ce système institutionnel qui ne me convenait plus. Peut-être que ces huit ans étaient nécessaires pour que je puisse arriver à m’extraire et que ma foi puisse mûrir et prendre son envol. Huit ans où j’ai été traversée par ces adolescents qui m’ont nourri, mais aussi qui m’ont posé des questions sur le fait que certains connaissaient leurs capacités scolaires ou parfois leurs incapacités, mais je mets entre guillemets, parce que j’estime que chacun a du potentiel. Mais parfois l’école, le système tel qu’il est proposé ne permet pas de l’exploiter. Quand je posais des questions à des jeunes, c’est quoi qui te fait vibrer dans la vie ? Qu’est ce qui est vivant toi ? Si tu avais une baguette magique ? C’est quoi ton rêve ? J’ai été interpellé par le fait que très peu savaient répondre à cette question-là et que très peu se connaissaient vraiment. En vérité, quelle était leur boussole intérieure ? Qu’est ce qui les animait ? J’ai réalisé le décalage. On demande à ces jeunes de s’orienter très tôt et très jeune. Mais comment s’orienter quand on n’est pas soi-même relié à sa boussole intérieure. Je me suis dit, il y a un problème. C’est très bien de savoir « est-ce que je suis scientifique, littéraire, artiste », c’est nécessaire. Je ne vais pas supprimer ce qu’apporte l’école. Ce sont deux approches. Tout à l’heure, on discutait en aparté. Je te rapportais les propos de Martin Seligman « la réussite éducative, c’est les compétences académiques associées à la connaissance de soi ». C’est ce constat que j’ai fait : l’école n’a pas toujours, et je le dis avec bienveillance, la capacité d’accompagner sur ce chemin là parce qu’il y a une pression de résultat, parce qu’il y a une pression de programmes à finir, parce qu’il y a un manque de temps et de formation. Il peut être bien qu’une personne extérieure à l’établissement apporte un regard complémentaire. Ce sont des regards qui se croisent, nous sommes tous éducateurs. L’enseignant va connaître le jeune en tant qu’élève, le parent en tant qu’enfant et moi en tant que jeune. Tous ces regards sont nécessaires pour l’accompagner. C’est tout cet accompagnement durant ses huit ans, cette réflexion que j’ai eue, ce constat que j’ai pu faire qui ont fait qu’aujourd’hui, je propose des interventions dans les établissements scolaires.
Katia : A quel moment as-tu franchi le pas entre ce que tu as pu analyser, observer, constater et tu te dis » là, il y a quelque chose à travailler, de plus spécifique à leur proposer pour les accompagner ». C’est ce qu’on disait tout à l’heure, rien n’est vraiment fait pour les aider à se connaître véritablement et ce qui pouvait être une force pour eux dans l’évolution de leur parcours et leur choix de vie. Quand tu dis, on leur demande de s’orienter mais s’orienter quand ils ne savent déjà pas eux-mêmes qui ils sont vraiment, comment savoir où aller. A quel moment vraiment, tu as fait la bascule, tu étais responsable pastorale et tu as décidé d’arrêter pour te mettre à ton compte ?
Fanny : Ça n’a pas été aussi simple que ça parce que ça n’a été ma première idée de mettre à mon compte. C’est beaucoup plus confortable d’être salarié. Au départ, je voulais créer un poste, qu’il y ait une personne qui prenne soin de l’humain. On m’a répondu et à juste raison « mais tu le fais déjà dans ta fonction pastorale ». Oui mais je suis limitée. Qui dit pastorale dit catho dit les clichés, les critères et je n’arrivais pas à rejoindre toutes les personnes, il y avait une certaine défiance. J’étais la Madame catho quoi. J’ai eu besoin de m’extraire de ça. Et puis on m’a dit que ça allait être difficile de créer un poste qui n’existe pas dans l’éducation nationale. En tout cas en France. J’ai rencontré les directeurs de cinq autres établissements auprès de qui j’ai partagé cette expertise. Ils m’ont tous répondu qu’ils n’auraient pas le courage de créer un poste spécifique qui soit de l’accompagnement de l’humain dans l’écoute.
Katia : Ce n’était pas une question de budget. On ne t’a pas dit « on n’a pas le budget » mais « on n’a pas le courage ».
Fanny : Il y avait deux réponses : on n’a pas le courage d’être innovant en fait et il n’y a pas l’aspect financier. Un des chefs d’établissement m’a dit « Fanny, je ne vois plus qu’une seule solution, monte-toi à ton compte et propose tes interventions à travers des ateliers ponctuels ». Au début, je n’ai pas sauté de joie à l’idée d’être à mon compte. J’étais bien formatée du salariat. C’était une sacrée prise de risque. Et en même temps pour répondre à ta question, j’ai senti qu’il fallait que je parte. Donc j’ai démissionné parce que je me sentais comme enfermée dans un carcan. D’autant plus que je ne l’ai pas dit mais moi aussi j’ai fait tout un travail sur moi, pour comprendre qui je suis. Quel est le sens ? Qu’est ce qui est important pour moi ? Et puis surtout, le fait de me sentir utile, d’œuvrer à quelque chose de plus grand. Ça peut paraître très prétentieux mais j’ai envie de participer à quelque chose de plus grand et qui me dépasse, qui ne m’appartient pas d’ailleurs. J’avais l’impression que dans ce système, mes ailes ne pouvaient pas se déployer. J’ai pensé qu’en me mettant à mon compte, j’allais réussir à trouver cette liberté d’action, cette liberté de pouvoir monter les ateliers comme je l’entends, mais en tenant bien compte des besoins, des réalités des jeunes et des adultes qui sont en posture éducative. Pouvoir être libre dans la manière de présenter, d’animer, ne pas me sentir entièrement redevable de l’institution dans laquelle je pourrais être.
Katia : Pouvoir te déployer pleinement comme tu as envie avec les outils que tu as envie d’utiliser sans avoir de comptes à rendre, créer quelque chose qui n’existe pas. D’expérience, est-ce que tu sais s’il y a d’autres ateliers comme tu proposes qui se pratiquent ou sont proposés en collège et lycée ?
Fanny : A ma connaissance sur les thématiques que j’aborde, il n’y en a pas.
Katia : Donc c’est une approche innovante ?
Fanny : Oui. Des personnes qui interviennent sur ces thématiques-là dans les structures éducatives, il n’y en a pas à ma connaissance dans d’autres régions et départements. J’ai suivi une formation à Paris auprès de l’association Tadam ? C’est une association qui a pris conscience du nombre d’élèves qui est en décrochage scolaire et qui s’est posée les questions « qu’est ce qui se passe ? Qu’est ce qui fait qu’à un moment donné, un jeune est en train de décrocher ? » L’idée est d’arriver à œuvrer avant que n’ait lieu le décrochage scolaire. ? C’est une formation que j’ai aimée suivre, qui rassemble des outils de l’ANC, l’approche neurocognitive et comportementale. C’est Jacques Fradin qui l’a initiée dans les années quatre-vingts. Elle rassemble les sciences cognitives, les neurosciences et les thérapies cognitives et comportementales. Ce sont des thérapies brèves. L’approche du jeune est holistique. L’idée est de les aider à comprendre la tête qui pense, le cœur qui ressent et le corps qui agit en travaillant la confiance en soi, l’estime de soi et le rapport à l’autre. On a une approche artistique, théâtrale, musicale. Cette association œuvre énormément dans la région parisienne, ils font des interventions. Moi je m’inspire de ces outils-là. Quand je crée un atelier sur des thématiques, j’utilise toute mon expertise, mes connaissances, ma formation en psychologie positive, mais aussi en ANC par cette formation auprès de Tadam, mon expérience en tant qu’éducatrice et maman et issue de mes parcours bénévoles. Je vais construire quelque chose qui va essayer de raisonner chez le jeune parce qu’ils ne sont pas qu’une tête, une tête ou un corps. L’humain est tellement multiple dans ce qu’il est que je n’ai pas du tout envie de m’enfermer dans un seul outil. D’autant que j’ai cette capacité de rebondir et de savoir adapter la casquette par rapport aux besoins de la personne en face de moi.
Katia : Et pourquoi les jeunes en particulier ? Tu nous parles beaucoup d’eux. Je disais en intro que tu es également formée aux premiers secours en santé mentale pour les jeunes spécifiquement. Tu as un attachement particulier avec eux ?
Fanny : Oui, exactement. Ça fait rire quand je dis que « je kiffe les ados ».
Katia : Je suis sûr qu’ils te kiffent eux-aussi.
Fanny : Je kiffe les ados pour plusieurs raisons. Déjà, et c’est ce que je leur dis, c’est que moi aussi j’ai été adolescente. Comme eux, j’ai vécu des moments difficiles et je crois que j’aurais aimé rencontrer un adulte qui pose un regard qui éveille, qui relève, qui réveille d’une bienveillance et qui aurait pu me donner des petits pour gérer mon mal-être, la confrontation avec les parents. J’ai envie d’être cette adulte. Je crois aussi que je soigne l’adolescente que j’ai été et je fais du bien aussi à mon adolescent. Et puis parce que l’adolescence est une période emplie de fragilités et de forces en même temps. Il y a une conscience de soi qui émerge, une conscience de ressentir, de penser. C’est la période de la construction de soi, de son identité. Qui je suis ?
Katia : C’est la période des problématiques identitaires.
Fanny : Je ne saurais donner d’autres explications. C’est comme instinctif et viscéral. C’est un âge qui me plaît. Il y a ce jeune adulte en effervescence, en émulation, qui demande qu’on puisse l’accompagner, l’entendre. Et puis ils cette capacité de s’emparer de l’espace qu’on leur propose avec une force incroyable, ils ont des choses à dire. Ils ont des choses à nous dire, ils ont des choses à me dire. Et quand je suis avec eux, je l’accueille en tant qu’éducatrice et en tant que mère aussi.
Katia : C’est une évidence aussi peut-être ?
Fanny : Oui, je crois qu’il y a comme une évidence. Le lien se fait très spontanément. Je fais du bénévolat auprès de jeunes qui encadrent des plus jeunes. Je prends soin de ces jeunes encadrants. Ce sont des jeunes adultes et j’ai une appétence, une émulation à les accompagner. Ces jeunes, je les trouve beau, merveilleusement fragiles mais surtout merveilleusement forts. Ils n’en ont pas forcément conscience. Et moi c’est ça que j’essaye humblement de leur faire comprendre, qu’ils ont un potentiel inné en eux. Si j’arrive à leur âge à leur faire toucher du doigt, à leur faire goûter toute leur saveur, tout ce qu’ils ont en eux Quand je les vois se révéler à eux-mêmes, j’ai une grande émotion. Je les vois s’emparer de qui ils sont et je les vois grandir se dire « En fait, je suis quelqu’un de bien, j’ai des capacités, du potentiel. Je ne suis pas qu’un élève, je ne qu’un enfant, je suis un individu en pleine effervescence. Et moi aussi, j’ai quelque chose de beau à l’intérieur de moi. » Je kiffe.
Katia : J’ai oublié de préciser que tu étais la fondatrice de Izargia dont le slogan, l’accroche, est Révélons vos talents. C’est exactement ce que tu fais avec ces jeunes. Tu es là pour révéler leur plein potentiel. Pour ceux qui ne parleraient pas basque, puisque c’est un mot basque, qu’est-ce que Izargia signifie ? Et pourquoi ce choix ?
Fanny : Il a été mûrement réfléchi. A la base, ce sont deux mots basques « izar » et « argia ». Un ami basque m’a proposé de les contracter pour faire Izargia qui veut dire lumière d’étoiles. Je voulais vraiment que ces deux mots puissent être ensemble. Mon logo est un cercle dans lequel prennent naissance des étoiles. Il y a une sorte de racines, des étoiles sortent du cercle et se déploient à l’extérieur du cercle. Je suis convaincue, et la psychologie positive l’est aussi, qu’on a en soi un trésor inexploité qui n’attend qu’une seule chose, pouvoir émerger. Et donc ces étoiles représentent les talents, les dons, les forces, les compétences, les capacités que l’on a à l’intérieur de soi. Ce que j’ai envie de faire, c’est de faire toucher du doigt aux jeunes toutes ses forces, ses capacités, ce potentiel, ses étoiles, et de les faire émerger d’abord au service de soi et au service des autres.
Katia : Est ce qu’on peut dire que tout ce que tu es en train de nous raconter est le why, l’ikigaï ou le pourquoi de ton activité ? Ce qui motive la création de cette activité et son déploiement.
Fanny : C’est exactement ça. Voir cet épanouissement. Si ça peut commencer le plus tôt possible, que de temps gagné. Je me dis que plus on est dans la capacité de se connaître et savoir quelles sont nos forces, nos ressources internes et externes aussi, cela apprend à savoir demander de l’aide, à accepter cette vulnérabilité dont on est fait. Donc en somme, être authentique. Et ça, c’est vraiment une de mes valeurs d’authenticité qui permet de pouvoir être en vérité et de créer des relations. Et plus je pense qu’on est capable de se connaître, de savoir de quoi on est fait, plus on a la capacité de s’adapter, de rebondir par rapport à des épreuves, des situations.
Katia : Tu as anticipé ma question parce que je voulais te demander quelles étaient les valeurs. Tu en as cité une. Est-ce qu’il y en a d’autres que tu as envie de nous partager ?
Fanny : L’harmonie. Ça, c’est quelque chose qui est important pour moi.
Katia : Quelle définition donnerais-tu toi à l’harmonie ?
Fanny : Il y en a deux définitions : l’harmonie avec soi-même, être aligné avec ce qui est vivant à l’intérieur de soi et l’harmonie avec les autres, c’est le relationnel. Pourquoi cette valeur me porte ? Parce que j’y mets « être un liant pour créer du lien ». L’authenticité, comme je le disais tout à l’heure et une ouverture d’esprit qui me permet de pouvoir accueillir l’autre comme il est, dans ce qu’il est, là où il est et de l’accompagner là où il doit aller lui et pas là où moi j’ai envie ou le système a envie qu’il aille. L’autre valeur qui est importante, c’est la notion de liberté et de libre-arbitre.
Katia : Comment est-ce qu’on peut faire appel à toi ? Comment es-tu accessible ? Où est-ce qu’on te trouve ?
Fanny : Alors moi je suis à contre-courant à l’heure actuelle des courants, des sites, donc vous ne trouverez pas sur un site internet. C’est un choix délibéré et voulu aujourd’hui, je peux changer d’avis. Donc tout simplement, par téléphone.
Katia : Si tu es d’accord, on pourra noter ton numéro en dessous de l’épisode.
Fanny : Par mail. Et j’ai craqué, vous me retrouverez sur LinkedIn sous mon nom. Vous ne verrez pas une page internet avec les avis, je chemine tranquillement dans l’ombre. J’ai envie de faire comme autrefois par le bouche-à-oreille.
Katia : C’est ce qui fonctionne bien pour toi jusqu’à présent.
Fanny : Jusqu’à présent, oui.
Le Nouveau Monde selon Fanny Courau
Katia : Dans ce podcast, j’ai souhaité donner la parole aux acteurs du Nouveau Monde. Si tu es là, c’est parce que je considère que tu en fais partie et que tu reconnais dans la définition que moi j’en ai donnée. Qu’est-ce que c’est pour toi, le nouveau monde si tu devais nous définir en quelques mots ?
Fanny : Le nouveau monde, ce serait pour moi un monde où on remet au centre l’humain. L’humain n’est pas un moyen de s’enrichir mais au contraire, on inverse le raisonnement. L’argent est un moyen au service du plein potentiel de l’humain. Les Acteurs du Nouveau Monde sont ceux qui sont en connexion avec ce qui résonne à l’intérieur d’eux, leur petite voix, ceux qui suivent leur intuition, qui osent mettre en place des choses qui n’existent pas et qui sont peut-être à contre-courant de ce qui est proposé. Et quand je dis à contre-courant, je ne dis pas forcément en opposition. Des gens qui ont envie de voir des transformations pour le bien-être des individus, pour le bien commun de notre planète, pour le vivant, pour s’ouvrir à soi et s’ouvrir aux autres. Être Acteur du Nouveau Monde, c’est être dans la coopération. C’est être en réseau. Il y a une phrase qui me vient « tout seul, on va plus vite mais ensemble on va plus loin ».
Katia : Et toi, en quoi est-ce que tu penses pouvoir y apporter ta pierre ou qu’est-ce que tu souhaiterais pouvoir y apporter à ce Nouveau Monde ? Comment tu te situes ? Comment y participes-tu ?
Fanny : C’est une bonne question. En toute humilité, ce que j’apporte ou sème, est-ce que c’est une pierre ou une graine, c’est l’espérance, la confiance, le courage et se dire que tout est possible. Alors oui, par moments, c’est difficile, on peut baisser les bras, on peut courber le dos, mais il y a toujours une réponse à une solution, qu’elle soit à l’intérieur de soi ou à l’extérieur.
Katia : Tout problème a sa solution.
Fanny : Exactement. Parfois, on n’a pas toujours les cartes en main. Et travailler en réseau, en équipe, ensemble peut aider. Peut-être qu’en parlant, en discutant, l’autre peut t’aider à un début de réponse.
Katia : C’est la force de l’intelligence collective. Alors, on arrive à la fin de l’interview. Est ce qu’il y a une question que je ne t’ai pas posée, que tu aurais aimé que je te pose ?
Fanny : Je ne pense pas. Par contre, de rajouter aussi que cette reconversion professionnelle, elle est née des enfants que j’ai trois enfants qui sont extraordysnaires. Ce sont des enfants qui ont un profil dys (dyslexique dysorthographique) et moi qui étais plutôt une élève, on va dire plutôt classique et scolaire, ils m’ont appris à faire le deuil de ces élèves-là, de ses enfants-là. Donc c’est grâce à eux aussi. Je suis sur ce chemin là parce qu’ils m’ont fait découvrir la difficulté que peut rencontrer un enfant qui a un profil dys, le combat qu’ils doivent mener, le fait de ne pas être dans la norme, la souffrance qu’ils peuvent ressentir, la honte aussi qu’on peut ressentir en tant que parents. Ce n’est pas facile à dire mais c’est important de l’exprimer parce que le système éducatif nous renvoie cette notion de réussir son enfant. Cela peut être une souffrance quand on a des enfants avec un profil qui ne rentre pas dans le moule. Et donc j’ai envie de dire merci à mes enfants. Et j’ai une grande émotion quand je dis ça, parce que c’est eux aussi qui m’ont mis sur ce chemin-là. Alors merci à eux.
Katia : Est ce qu’il y a quelque chose d’autre que tu souhaites nous dire avant de terminer ? Parce que moi, j’ai un petit quelque chose à te proposer.
Fanny : Non, c’est bon pour moi.
Le portrait chinois de Fanny Courau
Katia : Est-ce que tu connais le portrait chinois ? Si tu étais une fleur, si tu étais, etc. Si tu étais un plat, que serais-tu ?
Fanny : Je serai le poulet rôti frites du dimanche. Pourquoi ce choix ? Parce que c’est le fameux plat que je fais le dimanche. Les enfants sont là. On est tous ensemble réunis et c’est un moment de partage, de convivialité. C’est le plat qui rassemble la famille. Je cherche le mot, mais tu ne peux pas te tromper en proposant le poulet du dimanche. C’est le plat fédérateur. Sauf si je rate la cuisson du poulet.
Katia : Si tu étais un livre ?
Fanny : Alors j’en ai plein. Il y en a un qui me vient et qui est en lien avec tout ce que j’ai pu dire sur mon parcours que j’ai lu il n’y a pas longtemps. Ce n’est pas un grand livre intellectuel, mais moi, il m’a nourri en tant que maman. Il s’appelle « Né sous une bonne étoile » d’Aurélie Valognes. Elle parle avec tendresse des enfants aux profils différents et toute la complexité et aussi la beauté des rencontres et de certains enseignants, éducateurs qui ont posé un regard différent sur ces enfants-là et qui permettent de faire émerger le potentiel qu’ils ont. C’est un livre qui m’a beaucoup remuée en tant que maman et entend qu’éducatrice.
Katia : Quelle résonance avec tout ce que tu nous as décrit faire avec tous ces jeunes.
Fanny : Ça a renforcé cette envie effectivement d’accompagner tous ces jeunes.
Katia : Si tu étais un dicton ? Tu nous en as déjà donné mais est-ce qu’il y en a un en particulier qui te guide, t’anime, qui est ton fer de lance ?
Fanny : J’en ai deux. Il y a la citation de Nelson Mandela « Dans la vie, je ne perds jamais. Soit je gagne, soit j’apprends ». Il faut dire qu’il n’y a pas d’échec. Je le dis aux jeunes et à mes enfants. L’échec reste un échec s’il n’y a pas effectivement cette notion d’aller chercher le pourquoi, qu’est ce qui s’est passé ? Quel est le message que je dois retirer ? Et quand on en arrive là, ce n’est plus un échec, C’est une expérience de vie. Je pense que je dois la sortir une fois par jour.
Katia : C’est ton mantra.
Fanny : La deuxième est plus longue, mais ça a été une vraie révélation. C’est un extrait d’un des écrits de Marianne Williamson qui, écrivaine et conférencière et qui est maître spirituel aussi. Elle a écrit ceci « Notre peur la plus profonde n’est pas que nous ne soyons pas à la hauteur. Notre peur la plus profonde est que nous sommes puissants, au-delà de toute limite. C’est notre propre lumière et non pas notre obscurité qui nous effraie le plus ». Celle-ci je l’avais affichée en grand dans l’aumônerie et elle raisonnait autant pour les autres que pour moi. Parfois, on a peur, non pas de nos peurs mais on a peur de toutes nos capacités, de toutes les richesses qu’il y a en nous.
Katia : Parfois, on peut avoir peur de la réussite.
Fanny : On peut avoir peur de la réussite, du bonheur, d’être heureux alors que nous avons tous droit à ce bonheur-là et tous le droit de révéler tout ce qu’il y a de beau en nous.
Katia : Si tu étais un film ?
Fanny : Celui qui me vient de suite est « Le cercle des poètes disparus ». Parce que le professeur qui était joué par Robin Williams va à l’encontre d’un système bien codifié et bien rigide et va chercher le plein potentiel de ses élèves. J’ai trouvé ça magnifique. Je ne me lasse pas de voir.
Katia : Et cette scène finale où il vient dire aurevoir aux élèves du lycée où il est renvoyé. On les monter sur leur bureau pour montrer leur soutien.
Fanny : C’est une scène qui est magnifique. Ça montre d’autant plus qu’on n’oublie pas.
Katia : Si tu étais un super héros, une super héroïne, qui serais-tu ?
Fanny : Je ne sais pas si j’ai un super héros ou une super héroïne, mais ce qui me vient, c’est Rebelle, le personnage du dessin animé de Disney. Elle n’a pas du tout l’allure de la super héroïne. Je l’adore. La première fois que je l’ai vue, je me suis dit, c’est moi !
Katia : Qu’est ce qui te plaît chez elle ?
Fanny : Elle se libère de tout ce carcan familial, du devoir « Il faut faire comme ça parce que tu es une princesse, de la lignée de ». En fait, elle suit son instinct, ses tripes, ses désirs et moi, je suis complètement fan de cette rebelle, de son côté anticonformiste. Soyons des électrons libres.
Retranscription faite à l’aide d’AutoScript.